Êtes-vous un “bon optimiste” ? Comprendre la différence entre optimisme, positivité et réalité
- Michaël SERVAGE

- 24 nov.
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 26 nov.

Dans la culture populaire, certaines phrases reviennent comme des mantras :
« Sois positif. »
« Tout va bien se passer. »
« Quand on veut, on peut. »
« Le verre est à moitié plein. »
Elles semblent toutes dire la même chose :qu’il faudrait regarder le monde avec un sourire, miser sur la lumière, croire que l’avenir nous sera favorable.
C’est une sorte d’inconscient collectif : l’idée qu’il faudrait toujours choisir l’optimisme, comme si nous n’avions que deux options, voir le bon ou voir le mauvais côté des choses.
Et si les choses étaient plus complexes ? Et si l’optimisme n’était pas toujours l’outil le plus adapté, et parfois même un terrain glissant pour le cerveau ?
Cet article explore précisément cela : sommes nous vraiment de “bons optimistes”, ou simplement des optimistes naïfs ? Et surtout : comment penser l’avenir sans tomber dans l’illusion… ni dans le catastrophisme ?
Optimisme ou positivité : deux mots différents, deux effets très différents sur le cerveau
Dans un monde totalement binaire, la règle serait simple :entre voir le verre à moitié plein et le voir à moitié vide, mieux vaut le voir à moitié plein.
Simple, efficace, séduisant.
Mais nous ne vivons plus dans ce monde binaire. La société est complexe, nos enjeux sont complexes, et nos cerveaux eux-mêmes sont beaucoup plus sophistiqués que cette petite métaphore sympathique.
Le cerveau ne fonctionne pas comme un coach Instagram.
Il a un rôle évolutif très clair : mettre en avant les choses négatives pour nous permettre de les corriger.
C’est ce qu’on appelle le biais de négativité, décrit et mesuré en psychologie cognitive depuis des décennies :
les informations négatives captent plus l’attention,
elles laissent plus de traces,
elles déclenchent des réactions émotionnelles plus intenses,
elles sont mieux mémorisées.
Autrement dit :si nous existons aujourd’hui, c’est parce que nos ancêtres n’étaient pas des optimistes béats. Ils repéraient les problèmes. Ils les mettaient en surbrillance. Et ils y survivaient.
Nous sommes littéralement les descendants des personnes assez négatives pour anticiper les dangers, et donc assez lucides pour corriger leur environnement.
Cela ne signifie pas qu’il faut être pessimiste. Mais cela signifie que l’optimisme aveugle n’est pas naturel, et peut même parfois devenir dangereux.
Coué, la répétition et la puissance du cerveau : le vrai, le faux, et ce qui est scientifiquement solide
On cite souvent Émile Coué pour expliquer l’importance des phrases positives. Sa formule exacte est :
« Tous les jours, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux. »
Ce n’est pas de la magie. Ce n’est pas de la pensée féérique. C’est un principe simple de neurosciences :
la répétition renforce les réseaux neuronaux.
Plus on répète une idée, plus elle devient familière. Plus elle est familière, moins elle rencontre de résistance. Et plus elle paraît plausible.
C’est également pourquoi même une idée fausse devient moins fausse lorsqu’on la répète, du point de vue subjectif. Non pas parce qu’elle devient vraie, mais parce que notre cerveau s’y habitue.
La répétition crée un terrain mental. Elle façonne les chemins d’accès. Elle conditionne ce que le cerveau considère comme “logique”.
Mais cette mécanique, très utile lorsqu’elle est bien utilisée, peut aussi produire l’effet inverse…
Le "danger" subtil : apprendre à croire l’avenir sans aucune preuve
C’est ici que l’optimisme peut devenir un piège. Lorsque l’on répète chaque jour :
« Demain sera une bonne journée »
« Tout va bien se passer »
« Je réussirai, c’est sûr »
… que sommes nous en train d’apprendre réellement à notre cerveau ?
→ Un forme de "méta-apprentissage" : croire l’avenir sans preuve.
Et c’est là que les choses se compliquent. Car s’habituer à croire l’avenir sans preuve fonctionne dans les deux sens.
Quand l’optimisme se transforme en pessimisme, et cela finira forcément par arriver un jour, car personne n’échappe aux creux, aux coups de fatigue, aux doutes, le cerveau utilise exactement le même apprentissage :
« Je dois croire mes pensées sur l’avenir, même sans preuve. »
Sauf que cette fois, l’avenir imaginé est sombre.
Et face à l’incertitude, qui est totale par nature, le cerveau répond instinctivement par des :
« Et si… ? »
« Et si ça se passe mal ? »
« Et si je n’y arrive pas ? »
« Et si tout s’effondre ? »
Là, c’est le saut à pieds joints dans une grande flaque d’anxiété.
Ce n’est pas parce que la personne est faible. C’est parce que elle a entraîné son cerveau à croire l’avenir, quel qu’il soit, sans distinction entre la logique et la fantaisie.
Pourquoi l’optimisme seul ne suffit plus dans une société complexe
Autrefois, les problèmes de nos lointains ancêtres étaient concrets : trouver de la nourriture, éviter les prédateurs, survivre au climat.
Imaginer le pire pouvait suffire à corriger une situation.
Aujourd’hui, les problèmes sont plus abstraits :
finances,
relations humaines,
carrière,
administration,
débordement mental,
priorités contradictoires,
pressions sociales.
Si quelqu’un a un gros problème d’argent, ce n’est pas seulement l’optimisme qui le sortira de là. Pas plus qu’un “tout ira bien”.
Il faut trouver une stratégie et amener une action concrète :
demander de l’aide,
repenser un budget,
changer une stratégie,
solliciter une ressource,
se réorganiser.
L’optimisme n’est pas une action. C’est une ambiance mentale.
Et une ambiance mentale ne remplace pas une démarche concrète.
La vraie alternative : la positivité logique
Reprenons un exemple très simple.
Demain, vous avez un entretien d’embauche.
Si vous dites : « Je vais réussir, tout ira bien ! »
→ C’est de l’optimisme.
→ Vous croyez un avenir que vous ne pouvez pas vérifier.
→ Cela peut aider un peu… ou vous piéger le jour où vous ne ressentez plus l’élan.
Si vous dites : « Voici comment j’aimerais que l’entretien se passe : je veux être calme, concentré, reposé, clair dans mes réponses. »
→ C’est de la positivité logique.
→ Vous définissez un objectif atteignable.
→ Le cerveau peut s’y adapter : mobiliser des souvenirs, des compétences, des ressources internes.
Là, il devient acteur, pas spectateur d’un futur fantasmé.
C’est moins romantique, moins féérique, moins “conte de fées”…mais infiniment plus efficace.
Le cerveau et la négation : pourquoi il faut formuler ce qu’on veut, pas ce qu’on fuit
On sait depuis longtemps que le cerveau traite mal la négation. Si on dit :
« Ne pensez pas à une table rose. »
→ Vous venez d’y penser.
Si on dit :« Pensez à une girafe bleue. »
→ Vous ne pensez plus à la table rose d’il y a une seconde... Mais maintenant si !
C’est exactement cela, être positif : définir clairement ce que l’on veut activer, plutôt que ce que l’on veut éviter.
Alors, êtes-vous un "bon optimiste" ?
La question n’est pas de savoir si vous voyez le verre à moitié plein. La question est de savoir :
Est-ce que vous croyez l’avenir sans preuve ? Ou est-ce que vous définissez ce que vous voulez réellement activer dans l’avenir ?
Est-ce que vous répétez des phrases comme des incantations ? Ou est-ce que vous construisez un terrain intérieur logique et atteignable ?
Conclusion
L’optimisme n’est pas mauvais. La négativité ne l’est pas non plus. Ce sont des outils.
Ce qui compte, c’est ce qu’ils apprennent à votre cerveau.
L’optimisme dit : « Crois l’avenir. »
La positivité logique dit : « Construis ce que tu veux y voir. »
La première peut rassurer. La seconde peut transformer.
Et pour la plupart d’entre nous, dans un monde aussi complexe que le nôtre, c’est cette deuxième voie qui offre la stabilité, la lucidité… et l’élan, même si bien entendu, tout n'a pas besoin d'être rationnel en permanence. Même la subjectivité est une forme de réalité.
Michaël Servage




Super intéressant !
À présent, à mettre en application pour un mieux vivre.
On en avait parlé à la toute première séance de thérapie ! Super intéressant 👌🏻